haut de page
accueil
E-
LE "RALLIEMENT" DE LA RÉUNION
1942
: la guerre fait rage sur tous les fronts et elle prend des allures inquiétantes,
même si, en mai 1942, les Anglais ont réussi à prendre pied à Madagascar,
laissant d’ailleurs volontairement sur la touche, à la fureur du général
de Gaulle, les Forces françaises
libres.
C’est
à la suite de ce “court-circuitage” que le Comité national français de
Londres décide clairement de s'intéresser à la Réunion
Dans
le tome 2 de ses "Mémoires de Guerre", Charles de Gaulle explique, en
effet, que “l'île Bourbon, isolée dans le lointain des mers du Sud, écartée
de la route des convois qui doublaient Le Cap, pauvre en ressources, habitée
par une population très diverse mais ardemment française, n'entrait pas
directement dans les plans des Alliés. Mais elle était exposée à quelque
coup de main combiné des Japonais et des Allemands, surtout depuis que l'accès
éventuel à Madagascar leur était interdit. D'autre part, nous n'ignorions pas
qu'une grande partie des Réunionnais souhaitaient que leur pays prît part à
l'effort de guerre.
Depuis
longtemps, je cherchais donc l'occasion de joindre l'île à la France
combattante... Aussi, le 11 novembre (1942), pris-je la décision d'effectuer le
ralliement“.
Ce
ralliement. est confié à deux hommes :
Richard
Evenou,, commandant le
contre-torpilleur des F.N.F.L., “le Léopard”, pour la partie militaire, et
le gouverneur intérimaire du Moyen-Congo,
Jean-Charles André Capagorry,
embarqué pour la circonstance à Pointe Noire, sur “le Léopard”.
Si,
comme le relate le commandant Richard (cf. page 116
), le débarquement des 90
fusiliers-marins du “Léopard”, s’est effectué à Saint-Denis, au petit
matin du 28 novembre sans trop de problèmes, par contre, dès que la nouvelle
s’est répandue, la ville du Port s’est retrouvée en état
d’insurrection. Un Comité de Salut Public constitué dès le matin du 28
novembre par un ex-employé du chemin de fer,
Léon de Lépervanche, prend la
situation en main et balaie les anciennes structures de Vichy.
Jean-Charles André CAPAGORRY
(Bayonne, 17 février 1895-Saint-Denis
de La Réunion, 19 mars 1981)
Les études secondaires à peine terminées,
André CAPAGORRY participe à la 1ère Guerre Mondiale d'août 1914
à septembre 1915. Gravement blessé, il est alors réformé, décoré de la médaille
militaire et de la Croix de Guerre avec Palme.
Après
un passage par l'Ecole Coloniale en 1925, André CAPAGORRY intègre le corps des
administrateurs des colonies, avec un poste au Congo. C'est là qu'il entend,
par radio, l'Appel du 18 juin 1940 et décide de rallier le Général De Gaulle
en administrant, pour le compte de la France libre, le Congo d'abord, puis le
Gabon. Cela lui vaut d'être remarqué à Londres et, tout comme De Gaulle, d'être
condamné à mort par contumace, par le gouvernement de Vichy. En novembre 1942,
il tient le gouvernorat intérimaire du Moyen-Congo, lorsqu'un ordre de mission
du chef de la France Libre lui enjoint de se tenir prêt pour "une visite
à Nouméa". En fait, ce n'est pas de l'administration de la Nouvelle Calédonie,
mais, ruse de guerre, du ralliement de La Réunion dont est chargé ce Basque de
48 ans. Il n'apprend la nature exacte de sa mission qu'au moment de l'escale
mauricienne du Léopard.
Après
5 années de fonctions en tant que dernier gouverneur de l'île Bourbon, il est
nommé Inspecteur Général des Affaires Administratives à Madagascar jusqu'à
la retraite en 1951. Compagnon de la Libération, Officier de l'Ordre National
du Mérite, Commandeur de la Légion d'Honneur, titulaires de nombreuses décorations
coloniales ou étrangères, André CAPAGORRY est très attaché à La Réunion où
il est venu s'installer pour la retraite et le sommeil éternel. Il repose,
depuis son décès en 1981, au cimetière militaire de Saint-Denis, à quelques
mètres de l'endroit où il avait débarqué au matin du 28 novembre 1942.
Le
gouverneur
André
Capagorry (Le Mémorial)
1 E - Télégramme du
gouverneur Aubert aux maires de
l'île / Hell-Bourg / n°556 / 49 mots / 28 novembre 1942 / 10h 30 mn
Le
Gouverneur à tous maires
Forces gaullistes débarquées sur la côte
à 4 heures 30. St Denis qui conformément mes ordres n'était pas défendu ai
informé ministre que me proposais exécuter plan défense île
Vous demande veiller avec total dévouement
sur population
Ai invité tous français à observer
calme et dignité toutes circonstances.
2 E - Délibérations du Comité de Salut Public du Port en date du 28
novembre 1942
Force française libre
Commune du Port
Administration municipale
Ayant reçu intimation de Monsieur de Lépervanche d'avoir à donner
ainsi que son conseil municipal, leur démission, en vue d'assurer l'ordre, dans
la Commune et d'éviter toute effusion de sang
Le conseil municipal réuni sauf MM.
Barat et Michel absents, ont décidé vu les circonstances, de donner leur démission.
Fait
au Port, le 28 novembre 1942
Léon
Coaquette, maire,
Lisador
Joseph, 1er adjoint...
Commune du Port
PV N°1 Le commissaire du
Peuple ordonne à la population féminine et enfantine de se tenir chez soi et
de n'en sortir sous aucun prétexte. Les hommes qui n'ont pas été réquisitionnés
dans les milices, doivent se tenir également chez eux. Tout rassemblement de
plus de cinq personnes est interdit.
Fait
au Port de la Pointe des Galets, le vingt-huit novembre 1942
Le
commissaire du Peuple
PV N°2 Ordre est donné à
tous les citoyens de remettre immédiatement leurs armes à la mairie, délai
extrême.
Port
le 28 novembre 1942
Le
commissaire du Peuple
PV N°3
Le
Toullec André
1 mousqueton, 1
chargeur, 25 hommes. Charles
Hoareau 1 pistolet, 2 chargeurs de rechange, 1 mousqueton, 10 chargeurs.
Fruteau
Raoul est responsable de M. L. Joseph
Port
le 28 novembre 1942
Le
commissaire du Peuple
PV N°4 Ordre est donné au
porteur de la présente commission, de perquisitionner partout où il jugera
bon, pour recueillir toutes les armes à feu, explosifs de toute nature qui
n'auront pas été remis à la mairie, par leurs détenteurs. Les contrevenants
seront arrêtés immédiatement. Toute rébellion devra être réprimée par la
force...
Fait
au Port , le 28 novembre 1942
Le
commissaire du Peuple du Salut Public
Commune du Port
Proclamation à la Population du Port
Citoyens
Notre tour est venu de lever la tête et de proclamer très haut notre
volonté de nous ranger aux côtés de nos alliés d'hier. Grâce à eux, et à
tous les Français qui bravent la mort, luttent depuis l'armistice, l'heure de
la libération de la Patrie approche. La Réunion est fière de prendre sa place
dans le combat. C'est avec joie que nous nous porterons au devant de nos libérateurs
et ferons de nos poitrines une barrière contre les balles que l'autorité
militaire fera tirer sur nos amis au moment du débarquement. Que tous les
soldats vraiment Français se rangent à nos côtés et Vive la France
combattante.
Port
, le 28 novembre 1942
Le
commissaire du Salut Public du Port
PV N°5 Le 28 novembre 1942 à
13h30, les bureaux des syndicats ouvriers de la Pointe des Galets ont décidé
de se placer volontairement sous l'autorité des Forces françaises libres et
combattantes, en conséquence les syndicats ouvriers déclarent déchus tous les
conseillers municipaux du présent conseil et de constituer un Comité de Salut
Public chargé d'assurer toutes les fonctions municipales, jusqu'à l'arrivée
des autorités militaires des Forces libres et combattantes. Ce Comité est
ainsi constitué : Commissaire à la Police et l'autodéfense populaire :
Léon
de Lépervanche. Commissaire au Travail :
Fruteau
Raoul et
Lakermance
Auguste... En conséquence, à partir de 13h30 ce jour, tous les fonctionnaires
civils et militaires de la commune du Port sont relevés de leur serment et ne
doivent obéissance qu'aux commissaires ci-dessus désignés dont ils relèvent.
Les serments de tous les fonctionnaires seront exigés ce jour à la mairie du
Port à 15 heures. Ceux qui s'abstiendront, seront considérés comme rebelles
et déférés à l'autorité populaire. Les actes du Comité provisoire seront
immédiatement exécutables. Les membres du Conseil des Syndicats décident de
donner à l'autorité municipale plein pouvoir, pour la mobilisation immédiate
de tous les citoyens de l'arrondissement, qui seront embrigadés dans les
groupes de milices ouvrières.
Ces miliciens recevront, dès leur
incorporation, un salaire journalier de 20 francs. Le Comité ainsi constitué
prend la dénomination de Comité de Salut Public de la Commune du Port.
Fait
au Port , le vingt-huit novembre mil neuf cent quarante deux.
3 E - Télégramme du gouverneur
Capagorry aux maires de l'île /
Saint-Denis / n°236 / 197 mots / 30 novembre 1942 / 10h 35 mn
Le
Gouverneur à tous maires
N° 409 C. Honneur vous faire connaître
que M.
le
Gouverneur Aubert a renoncé à poursuivre résistance et s'est rendu stop De ce
fait la vie doit reprendre son cours normal stop. Faisant confiance à votre
sentiment du devoir vous demande prendre cas échéant mesures utiles pour que
ordre soit maintenu partout et que population continue à travailler dans calme
stop Vous demande comme par le passé assurer jusqu'à nouvel ordre.
4 E - Articles du journal "Le Progrès", édition du 30
novembre 1942
Toute
résistance a cessé, le gouverneur Aubert s'est rendu. Voici à ce sujet la
communication du Gouvernement : "A la suite des négociations engagées
entre M. le gouverneur Aubert et les autorités de la France combattante, un
accord de principe a été réalisé. L'ordre de cesser le feu a été donné à
8h45. Nous recommandons à tous de garder le plus grand calme. Que chacun vaque
comme d'habitude à ses occupations et ne manifeste sa joie que par une ardeur
plus vive au travail pour que puisse revivre rapidement la prospérité de notre
île dans l'union la plus sacrée de toutes : celle de la lutte à outrance
contre le Boche.
Note de la Rédaction :
...Tous
sauront se hisser à la hauteur des événements du jour et n'avoir en vue que
la reprise de l'activité locale sous toutes ses formes, sous l'égide d'un
Gouvernement de liberté et de justice. Les Réunionnais, dont la noblesse de
sentiment ne s'est jamais démentie jusqu'ici, sauront une fois de plus se
mettre au-dessus de ces petites contingences de la vie et ne pas se laisser
aller à de vaines représailles.
Informations : Funérailles :
Hier ont eu lieu les funérailles de M.
Raymond
Décugis
M. le gouverneur Capagorry
entouré du Secrétaire général Rivière,
du capitaine
Paturau,
de l'enseigne de vaisseau Delachaux assistait aux funérailles.
Au cimetière M. J. Rivière, Secrétaire
général, adressa un ultime adieu au disparu en termes émouvants au nom du
Gouvernement, et M. Nida au nom du personnel des T.P. et du C.P.R.
5 E - Communiqué diffusé par Radio Saint-Denis à 12 h le 30 novembre
1942
Le
Gouverneur
Capagorry,
gouverneur de la Réunion, a le plaisir d'informer la population que le
gouverneur Pierre Aubert vient de renoncer à poursuivre une lutte inégale et
fratricide. En conséquence, les hostilités ont cessé sur le territoire de la
colonie et le sang n'y sera plus versé. Le gouverneur
Pierre
Aubert a fait son devoir avec courage et correction. Il lui sera rendu les
honneurs militaires... Vive le
général
de Gaulle, vive la France !
6 E - Arrêté n° 2189 C. du 2 décembre 1942
Le capitaine de frégate
Richard,
commandant le Léopard, est chargé par l'ordre 131 EMS du général de Gaulle
d'assurer la défense de l’île de la Réunion.
Parmi ses attributions, lui incombe
celle de l'organisation des ports.
En conséquence, à la date du 2 décembre,
tous les ports et leur personnel sont placés sous l'autorité directe de M. le
capitaine de frégate Richard, commandant le Léopard.
Photo
du Léopard (Le Mémorial)
7 E - Circulaire N° 2766 C
du 5 décembre 1942 - Cabinet du
gouverneur
à
Messieurs les chefs d'Administration et de service et M. les maires
J'ai l'honneur de vous faire connaître que les correspondances
officielles devront à l'avenir comporter l'en-tête qui y figurait antérieurement
au mois de juillet 1940, c'est à dire :
RÉPUBLIQUE
FRANÇAISE
Liberté
- Egalité - Fraternité
Je vous demande de vouloir bien donner les instructions utiles à ce
sujet
Le
gouverneur de la Réunion
signé
:
CAPAGORRY
8 E - Circulaire n° 2294 A.G. du 22 décembre 1942 du gouverneur à MM.
les chefs d'Administration et de Service et à MM. les maires
Bien que je ne veuille, ainsi que je l'affirme en toutes circonstances et
ne cesse de le prouver par mes actes, attenter en quoi que ce soit à la liberté
de penser, il m'apparaît cependant de mon devoir de m'opposer à toute
expression et manifestation de cette liberté , qui tendraient à compromettre
l'union des Français de ce pays ralliés à la France combattante. Notre cause
est sacrée : il s'agit de libérer la Patrie du joug de l'envahisseur. Rien de
ce qui peut nous détourner de ce but ne saurait être admis. Dans cet esprit,
j'estime opportun de voir disparaître des bureaux de services publics les
affiches, tracts et images de propagande, les photographies de personnalités
marquantes du régime engendré par l'armistice franco-allemand de juin 1940.
Ces documents, que d'aucuns maintiennent encore en évidence, risquent, malgré
la pureté des intentions dont je ne doute pas, de laisser croire aux personnes
fréquentant ces bureaux que l'union n'est pas complète, qu'il subsiste des
divergences de vues entre les Agents de l'Administration ou même une réticence
à l'égard du gouverneur officiel de la Réunion.
9 E - Article du journal "La Démocratie" du 11 février 1943
"Résistance active".
On
nous prie de signaler qu'il existe à l'Hôtel de Ville de Saint-Denis un foyer
de propagande contre le gouvernement du
général
de Gaulle, tenu par ceux qui tout dernièrement, avec un zèle et un courage
remarquables, verbalisaient des personnes honorables qui avaient commis le crime
effroyable de déposer des fleurs le 11 novembre au pied du monument de la
Victoire.
10 E - Article du journal "La Démocratie" du jeudi 11 mars
1943
Communiqué
A
la demande de très nombreuses personnes, le Bureau de l'Information publiera
bientôt dans la presse, les biographies des divers membres du Comité national
et français. Il rappelle que les renseignements les plus complets ont déjà été
donnés sur le
général
de Gaulle, président du Comité national, sur le
général
Legentilhomme, commissaire national à la Guerre et sur l'amiral d'Argenlieu,
commissaire national en mission, haut-commissaire de France dans le Pacifique.
Le public réunionnais pourra ainsi
mieux connaître les hommes qui dirigent l'effort de guerre de la France
combattante et en qui le Peuple de France a placé sa confiance et son espoir.
11 E - Article du journal "Dieu et Patrie" n° de mars 1943
Nous sommes entrés dans la guerre. Cela veut dire aussi qu'il faudra se
battre. Si l'on prend des volontaires, si l'on mobilise, ce n'est pas pour voir
des soldats dans les rues de Saint-Denis.
Des officiers vont venir, l'instruction
et l'entraînement seront poussés et chaque bateau qui viendra, emportera un
nouveau contingent, de nouveau il y aura des inquiétudes, des angoisses, qui,
pour être vaillamment et chrétiennement supportées, n'en seront pas moins
vives.
Et puis cela le général l'a dit également,
il faudra prévoir la défense de notre île susceptible d'être attaquée par
les Japonais. On installera des batteries sur les côtes, on entraînera des
troupes destinées à rejeter l'ennemi à la mer, s'il parvient à prendre pied,
autrement dit "on résistera", non plus seulement à Hell-Bourg, mais
partout.
Il ne sera plus question de déclarer
Saint-Denis ville ouverte et comme l'ennemi ne sera pas un Français, mais un
Japonais, il n'hésitera pas à bombarder et détruire, non pas l'une ou l'autre
usine, mais la capitale de l'île...
Puisque nous aurons beaucoup à
souffrir de la guerre, au moins ne nous faisons pas souffrir entre nous, aidons
nous les uns les autres...
Lors de la déclaration de guerre en 1939, plusieurs se sont rendus
compte de la témérité de la décision. On ne leur avait pas demandé leur
avis, ils n'ont pas approuvé la décision du gouverneur d'alors, mais ils ont
obéi, ils se sont tus, ils ont appuyé et aidé le gouvernement, ils ont fait
leur devoir. Il doit en être de même aujourd'hui. Certains n'approuvent pas le
gouvernement du général de Gaulle, il y a des irrésolus, il y en a qui
entendent rester fidèles au
maréchal
Pétain, cela se comprend (on ne change pas d'opinion comme de vêtement). Mais
il ne doit plus avoir d' opposition" ; l'opposition maintenant n'a plus sa
raison d'être...
Une opposition qui ne répond à rien, qui n'aurait d'autre but que de gêner
le Gouvernement dans toutes ses entreprises ne pourrait que démoraliser et donc
faire du mal, et sans aucun résultat utile. Elle pourrait de plus être cause
de représailles ou de mesures générales dont la collectivité aurait à
souffrir. Cela il ne le faut pas. Mais il ne faut pas non plus, comme le veulent
certains que l'on prenne des mesures vexatoires ou de représailles contre X ou
Y, fonctionnaire ou non, qu'on ne trouve pas assez chaud partisan. Ce ne sont
pas ceux qui font les plus belles proclamations qui sont les plus sincères ou
les plus fidèles...
12 E - Article du journal "La Démocratie" du jeudi 4 mars 1943
En l'honneur du
commandant
Richard : en présence du
général
Legentilhomme, du
gouverneur
Capagorry, des officiers formant la suite du général haut commissaire dans
l'océan Indien et des officiers du "Léopard", dans la salle du
conseil de l'Hôtel de Ville, sous la présidence de M. le maire
de
Villecourt entouré de ses adjoints et des membres du conseil des notables de
Saint-Denis, lundi dernier à 18h 30, avec toute la solennité voulue, fut remis
au commandant Richard, du "Léopard", le diplôme de citoyen d'honneur
de la ville de Saint-Denis...
13 E - Décret n°816 portant dissolution de la légion française des
combattants et des volontaires de la Révolution nationale ainsi que de ses
groupements annexes. Londres, 13 mars 1943
Art 1er : Le groupement de fait qualifié Légion française des
combattants et des volontaires de la Révolution nationale et ses groupements
annexes notamment les amis de la Légion et service d'ordre légionnaire sont et
demeurent dissous.
Art 2 : Les tentatives de maintien ou de reconstitution des groupements
dissous seront punis des peines prévues à l'article 2 de la loi du 10 juillet
1936.
Art 4 : Les biens des groupements dissous seront mis sous séquestre et
liquidés...
Un décret ultérieur réglera les
modalités de cette liquidation ainsi que les conditions dans lesquelles les
associations d'anciens combattants illégalement dissoutes par les règlements
de l'autorité de fait, les ayants droits des dites associations seront remises
en possession de leurs biens attribués à la Légion française des combattants
et des oeuvres dont elles assuraient la gestion...
14 E - P.V. de la réunion de la Ligue des Droits de l'Homme et du
Citoyen, section de St Denis, séance du 10 juillet 1943
Notre dernière réunion fut celle du 12 mai 1940. Plus de trois années
se sont écoulées depuis et, durant cette longue période, l'âme même de la
Ligue des Droits de l'Homme avec la flamme intime qui l'anime n'a pas varié...
Je suis heureux de constater que nous sommes restés intacts, du moins
moralement et que nous sommes demeurés, nous autres et dans ce pays à peu près
saufs dans le grand cataclysme qui présentement ensanglante le monde.
Mais ne nous empressons pas d'une trop
hâtive jouissance. C'est dans leur agonie que les bêtes féroces sont les plus
à craindre, et j'appelle ainsi tous les serpents qui, depuis de longues années
et bien avant la guerre actuelle, sapent la République et qui choisirent
l'heure de la défaite pour tenter de l'atteindre à mort...
15 E - Conseil municipal du Port, séance du 23 octobre 1943 (Archives
municipales du Port). Discours de M.
Joseph Lisador, président de la
Délégation Spéciale, au sujet des risques de troubles
Occupé par la distribution des tickets de tissus et de riz aux dockers,
je n'ai pu vous réunir avant... Je ne dois pas non plus vous cacher que la
situation n'est pas attrayante ; les ennuis de toutes sortes qui se présentent,
crise du travail, de l'alimentation, de l'habillement, vie chère, rendent la
population inquiète et nerveuse et cet état d'irritation peut être exploité
par de mauvais esprits en vue de provoquer des troubles...
16 E - Câblogramme du
gouverneur Capagorry à Alger en
date du 23 octobre 1943
Reconnaissant me faire parvenir urgence mille insignes Croix de Lorraine.
/ Raisons politiques locales. / Dépense sera supportée par la colonie. STOP.
CAPAGORRY.
17 E - Délégation Spéciale du Port, séance du 3 décembre 1943
Après une année de fonction la délégation spéciale du Port,
consciente de sa gestion, faite en conciliant l'œuvre de redressement
entreprise par nos dirigeants et la sauvegarde des intérêts de ses administrés,
réaffirme sa volonté de collaborer en dehors de toute ingérence politique,
des luttes fratricides des partis, et en toute loyauté, à la tâche que s'est
assignée M. le gouverneur Capagorry, fidèle représentant du général de
Gaulle. A l'occasion du ralliement de la Réunion à la France combattante, et
aux échos des victoires alliées, la délégation
est heureuse de manifester son admiration devant les résultats acquis et
sa foi dans un avenir meilleur. Elle prie humblement M. le chef de la colonie d'être
l’interprète de sa pieuse gratitude à l'égard du Comité national français.
18 E - Article du journal "Le Progrès" du 7 janvier 1944
Hier
après-midi, à l'Hôtel de Ville de Saint-Denis a eu lieu la constitution de
l'Association Bourbonnaise de la France combattante. Ont été élus : Président
:
Paul
Chatel, vice-présidents MM.
Vallon
Hoarau,
Albert
Rieul et
Raymond
Vergès. Président d'honneur :
André
Capagorry et
Mickaël
de Villèle, délégué de la Réunion à l'Assemblée Consultative d'Alger.
19 E - Article du journal "Le Progrès" du 4 mai 1944
Au
cours de la Fête du Travail ai lu votre télégramme qui a suscité
enthousiasme chez nos camarades et dont le mot d'ordre est : "tous derrière
le
général
de Gaulle et le Comité de libération nationale. En leur nom et au mien vous
remercie. Docteur Vergès.
20 E - Article du journal "Le Progrès" du 5 mai 1944
Les travailleurs du Port, Dockers et Cheminots syndiqués qui, le 28
novembre 1942, les armes à la main ont lutté pour remettre leur cité à la
France combattante, adressent à l'occasion du 1er mai 1944 leur salut fraternel
à tous les travailleurs de l'île et à tous les antifascistes du monde.
Réitèrent leur profond attachement au
général de Gaulle et au Comité français de la libération nationale.
Saluent tous les Héros qui sur le sol
de la Patrie luttent et meurent pour sa libération.
Estiment que tout doit être subordonné
à la libération de la Métropole.
En conséquence, souhaitent :
1) Qu'une partie, sinon la totalité
des plus values réalisées par le Gouvernement sur la vente des sucres des
campagnes précédentes soit affectée aux fonds d'armement.
2) Que la mobilisation des capitaux
soit un corollaire logique de la mobilisation des hommes, tant pour l'armement
que pour le ravitaillement de la Mère Patrie lors de sa libération.
Vive le général de Gaulle, Vive la
France !
21 E - Extrait d’un procès-verbal de la réunion de la Ligue des
Droits de l'Homme et du Citoyen, section de St Denis, séance du 14 juillet 1944
Le citoyen
Benjamin
Hoarau remarque que l'épuration n'a pas été faite à la Réunion. La Ligue,
dit-il, doit protester contre la politique réactionnaire qui se continue au
pays.
Ici, à la Réunion, peut-être parce
qu'on est loin de la Métropole, on bafoue la République.
Le citoyen
Lucas
Evenor déclare qu'il est en plein accord avec ce que vient de dire le citoyen
Benjamin Hoarau, en ce qui concerne l'épuration. Il ajoute que les ordonnances
et décrets qui visent à l'épuration soient appliqués à la Réunion. La
Ligue se doit de demander leur application. En ce qui concerne le régime
politique qu'on nous impose encore en ce moment, la chose est plus difficile.
22 E - Article du journal "Le Progrès" du lundi 7 août 1944
Syndicat
des Fonctionnaires - Agents et Employés Permanents des Travaux Publics :
Les membres adhérents de ce syndicat
sont convoqués en Assemblée générale le mardi 15 août prochain à 1O h 3O
dans la salle de la Loge "l'Amitié", rue du Barachois... Ordre du
jour... Paiement des cotisations. Modification des statuts. Renouvellement du
Bureau... Le président
A.
Gangnant.
23 E - Lettre confidentielle du
gouverneur Capagorry au
procureur général de Saint-Denis du 16 avril 1945
J'ai l'honneur de vous accuser réception de votre lettre confidentielle
N° 1032 APG du 10 avril 1945, relative à l'application à la Réunion de
l'ordonnance du 10 mars 1945, rendant applicable aux colonies de la Guadeloupe,
de la Martinique et de la Réunion les dispositions de l'ordonnance du 26 décembre 1944, complétée par celle du 9 février
1945, portant modification et codification des textes relatifs à l'indignité
nationale...
En ce qui concerne l'exercice des fonctions que vous assumez, j'estime
pour ma part qu'aucun des faits survenus à la Réunion entre le 16 juin 1940 et
la date de sa libération, le 28 novembre 1942, ne tombe sous le coup des
dispositions de l'ordonnance du 26 août 1944.
Ainsi que j'en ai rendu compte au mois de novembre dernier au Département,
l'action des personnes qui ont servi les gouvernements Pétain jusqu'à mon
arrivée ne s'est jamais exercée ici sciemment en faveur de l'ennemi. Et s'il y
fut quelques ardents propagandistes de ce qu'on a appelé "La Révolution
nationale" et si en fait elle compta de très nombreux adeptes, cette
propagande évita toujours soigneusement de recommander la collaboration avec
l'ennemi ou le racisme, pour des raisons tirées des contingences locales.
Au surplus, j'ai promis publiquement, les 28 et 30 novembre 1942, avec
l'approbation du Comité national français, que les personnes qui avaient
participé antérieurement à mon arrivée à cette action ne seraient pas inquiétées
si ces personnes se rangeaient sincèrement derrière le
général
de Gaulle.
N'ayant rencontré depuis ma prise de fonctions aucune opposition,
j'estime que je suis lié par cet engagement que le Gouvernement, à plusieurs
reprises, depuis qu'il a été pris, a considéré comme demeurant absolument
valable à l'occasion de l'examen de divers cas particuliers...
24 E - Article du journal "Le Cri du Peuple", 9 mai 1945
C'est avec une joie vraiment délirante que la population a appris hier
soir la fin de l'horrible guerre en Europe déchaînée il y a 6 ans par le fou
démoniaque
Hitler.
Pour la seconde fois c'est
l'effondrement des rêves nourris par les ambitions d'Outre Rhin. C'est aussi la
fin du nazisme abhorré comme en 1918 ce fut la fin du Pangermanisme.
Adieu
la Mittle Europa !
Adieu
l'asservissement du monde !
Pour la première fois depuis près
d'un siècle l'Allemagne a enfin connu les horreurs de la guerre transportée
sur son sol. c'est la victoire de la Démocratie, de la Liberté sur le Fascisme
!
Gloire
aux vainqueurs !
Vive
la France !
Vivent
les Alliés !
25 E - Article du journal "Le Peuple" 11 mai 1945
Les
fêtes de la Victoire à Saint-Denis
La nouvelle tant désirée a été annoncée successivement par la radio,
la sirène et les cloches de toutes les églises, provoquant partout une
explosion de joie, d'allégresse et d'enthousiasme.
On vit aussitôt la ville entière
debout et les rues remplies de monde, chaque groupe hâtant le pas d'instinct
vers le Monument de la Victoire où une foule immense était bientôt réunie.
Un projecteur installé sur un balcon voisin inondait de ses rayons la colonne
du Monument faisant apparaître dans toute sa splendeur la statue, symbole de la
Victoire de 1919 et aussi de celle de ce jour 7 mai, juste couronnement des
glorieux sacrifices des innombrables Morts et Martyrs de cette guerre : Soldats,
Marins, Aviateurs tombés au Champ d'Honneur, les otages fusillés, les civils
morts de faim ou de froid, les prisonniers et les déportés, morts en captivité
derrière les barbelés des oflags et des stalags allemands...
26 E - Article du journal "Le Progrès",
11 mai 1945
Pour nous Français, au moment de la Victoire, nous devons reporter, avec
ferveur notre pensée vers le général de Gaulle et lui offrir le tribut de
notre hommage reconnaissant. Certes, nous aimons trop la liberté pour créer en
France le fétichisme gaulliste ; mais nous devons à Celui qui fut le Libérateur
de la France et qui est le meilleur artisan de sa résurrection, le culte de la
reconnaissance nationale ; car, pour les Français, le nom de
Charles de Gaulle
sera un nom immortel.
27 E - Article du journal "Dieu et
Patrie", 15 mai 1945
...L'armistice est signé, la guerre est terminée ! Et voilà qu'aussitôt
les cloches des quatre paroisses de Saint-Denis s'ébranlent joyeusement et
lancent à travers toute la ville la bonne nouvelle si impatiemment attendue.
Depuis une semaine bientôt les drapeaux sont aux fenêtres et au-dessus des
portes, on en ajoute en hâte de nouveaux, mais surtout la foule envahit aussitôt
les rues se dirigeant spontanément vers la place du Gouvernement ; en moins de
10 minutes, les élèves du Lycée sont dans la rue, musique et drapeaux en tête
et entraînent dans leur sillage des groupes nombreux. En bas de toutes les rues
la foule en délire débouche, on crie, on chante la Marseillaise, le Chant du départ,
Vive de Gaulle, Vive la France, Vive l'Angleterre, etc. l'allégresse ne se
calme que vers 9 heures du soir.
Le lendemain à 17 heures Te Deum à la
Cathédrale, trop petite pour contenir la foule des fidèles, ...tous les cœurs
étaient à l'unisson pour remercier Dieu d'avoir enfin donné la paix au
monde...
Fêtes
de la Victoire Saint-Denis 8 mai 1945 (Le Mémorial)